3 avril 2025
Inutile de vous rappeler à quel point je suis un garçon ouvert et tolérant. Ma simple et profonde modestie me l’interdit. Je dois cependant confesser au moins une entorse à cette ouverture d’esprit : je suis affligé d’une profonde aversion pour l’autocar. Je comprends que cela puisse choquer ceux d’entre vous, adeptes de ce moyen de transport collectif qui, à défaut d’être parfaitement conforme aux normes environnementales présente l’avantage de diviser son empreinte écologique par le nombre de passagers qu’il transporte. Oui mais voilà, aussi loin que je me souvienne, je ne supporte pas d’être enfermé dans ces tubes de métal et de verre dont les mouvements ont un effet déplorable sur mon système digestif. A ces inconvénients physiques s’ajoute l’exaspération psychologique face à la lenteur pataude de ses véhicules. Cette détestation remonte la lointaine époque où je partais en colonie de vacances vers les stations alpines par de tels transports, ce qui constituait une triple peine compte tenu de mon égale répulsion pour les voyages en groupe autant que pour le ski. Mais pourquoi cet aveu en cette belle matinée printanière ? Parce que je vous écris d’un lieu sublime, une ancienne abbaye transformée en hôtel de très grand luxe dans laquelle se déroule le jury du Grand Prix de la Communication extérieure. C’est l’une des grandes manifestations publicitaires françaises, autrefois connue sous le nom de Grand Prix de l’Affichage à laquelle j’assiste depuis des années. Longtemps ces rencontres se sont faites sous des cieux lointains que l’on rejoignait en avion, parfois privés. Epoque révolue puisque nous sommes présentement à quelques dizaines de kilomètres de Paris, raison pour laquelle l’organisation avait prévu un déplacement par l’un de ces engins dont vous savez désormais mon puéril dégoût. Aussi ai-je pas hésité en apprenant qu’il était possible de rejoindre cet événement par ses propres moyens. La route pour s’y rendre tournicotant gentiment, le boomer égoïste se décida pour la moto à essence, nonobstant les dommages écologiques. Et c’est ainsi que je me suis retrouvé le nez au vent et le soleil dans l’œil, en route vers ce bel endroit sans l’aide du GPS, celui-ci s’étant mis en congé pour des raisons inconnues. Dans ce cas, il n’y a d’autres solution à motocyclette que de s’arrêter de temps en temps pour vérifier sur son smartphone que la route est la bonne. Or miracle, alors que je me croyais perdu, j’étais à quelques encablures de mon but. Une chance que je mesure et qui me paraît presque injuste au regard du monde dans laquelle elle se manifeste. Mais pour aujourd’hui, désolé, je reste dans ma bulle. Et j’en profite. Égoïstement.