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Tord-boyaux

14 mars 2025

Vous le savez certainement, je suis un garçon d’une très grande distraction. J’ai de qui tenir, ma mère oubliait régulièrement sa voiture garée en double file en sortant de la boulangerie. J’ai moi-même perdu un vélo dans les mêmes conditions. Ce qui fait que lorsque je constate un problème je commence par investiguer de mon côté. Ce n’est pas de l’humilité, juste de la lucidité. Le souci, c’est que notre monde s’est tellement déréglé ces derniers temps que cela devient très compliqué de déterminer ce qui est plausible ou non. Avant-hier, je m’étais réveillé en apprenant l’acceptation ukrainienne de la proposition de cessez-le-feu avec la Russie. Je ne sais pas vous, mais j’avais quelques doutes sur les chances d’aboutissement de ces discussions. Or quelques heures plus tard, je reçois une alerte mail d’un quotidien économique national m’informant que les discussions entre les présidents américains et ukrainiens avaient tourné court et que tout le monde était reparti furieux. Bizarre, me dis-je, mais après tout pourquoi pas, étant donné la psychologie de certains protagonistes de ce drame. Je ne vois pourtant nulle confirmation par ailleurs. Puis hier, un autre mail de ce même média m’informe – un peu tardivement – que l’alerte de la veille était une erreur et qu’il ne fallait pas en tenir compte, désolé pour le dérangement, etc. Combien de fois cela m’est-il arrivé au cours de ma carrière ? Je ne préfère pas compter mais cela me tordait si profondément les boyaux que je m’excusais piteusement dès que possible. L’avantage de ce métier, c’est qu’une fois le rectif publié, les angoisses se dissipent instantanément. Jusqu’à la prochaine bourde. Mais dans cette période où l’on peut prétendre que les fautes des uns sont celles des autres, je conçois que la sérénité soit difficile à trouver. Ainsi j’ai vu passer une vidéo montrant une liste de mots que l’administration américaine aurait interdit d’employer dans les documents officiels. On y trouve racisme et antiracisme, injustice, crise climatique, femme, noir ou discrimination. Si cette info est exacte, cela va quelque peu compliquer la communication des organismes concernés. Et comme j’ai découvert cet article au sortir de la visite de l’exposition sur « l’Art dégénéré » au Musée Picasso, mon trouble n’en a été que plus grand. Il s’agit des œuvres d’artistes que le régime nazi considérait comme impurs. Elles avaient été exposées à Munich en 1937, non pour les admirer mais pour les conspuer. Une conception de l’art et plus généralement de la société que je croyais appartenir au passé. Encore une erreur qui me tord les boyaux.