Skip to content Skip to sidebar Skip to footer

Silence sans fuite

C’est un peu comme une libération. Je me permets d’insister sur l’emploi de l’adverbe « un peu » dans cette phrase car à la découverte de ce qui suit, le lecteur comprendra certainement qu’il n’y avait rien de dramatique ou de grave. Il n’empêche qu’en ce lundi, aussi maussade soit-il, je ressens une certaine légèreté. Car voici un mois que deux des pièces principales de notre maison étaient en rénovation, littéralement du sol au plafond. Un chantier qu’il serait exagéré de qualifier de colossal mais qui nécessitait le déplacement de nombreux meubles et d’une quantité d’objets, vaisselle bibelots, livres, disques et autres supports vidéo plus ou moins obsolètes. Un boulot dans lequel je reconnais avoir eu un rôle mineur, l’essentiel ayant été planifié, géré et exécuté par mon admirable épouse pendant que je vous écrivais des inanités matinales. Mon rôle, comme souvent dans ce cas est réduit à l’utilisation de ce qui me reste de force musculaire, soit ma seule relative compétence en ce domaine. Il y avait cependant un point qui me préoccupait fortement avant le début des opérations. La personne qui nous avait recommandé l’artisan pour son sérieux et sa méticulosité nous avait néanmoins prévenus qu’il travaillait en écoutant la radio. Une station diffusant de la musique et des blagues à en croire son nom. Un point de détail diront certains, mais pas pour moi. Ce n’est pas tant le style de musique ou la qualité des plaisanteries débitées qui me souciaient que la perspective d’être envahi par des sons non sollicités émis par un transistor crachotant. Aussi avais-je vérifié que ma provision de bouchons d’oreilles était suffisante de même que l’état de marche de mon casque audio. Nous avions même un temps envisagé de prendre quelques jours de vacances à l’étranger, loin de ces désagréments. Finalement, nous n’avons pas fui et nous avons eu raison. Contrairement aux sombres prévisions, l’homme de l’art s’est en effet révélé aussi efficace que discret, se contentant de siffloter pendant son travail, soit un comportement conforme aux standards de sa profession. D’autant que le résultat est à la hauteur de sa réputation. Raison pour laquelle, en cette première matinée ou nous n’avons pas été obligés de nous lever aux aurores pour l’accueillir décemment – c’est-à-dire pas en pyjama – et alors que le travail de réinstallation de la maison commencera sitôt ces mots envoyés, je me sens un peu comme un nouvel homme dans un nouveau monde à bâtir. Un tout petit monde bien propret et préservé du grand à propos duquel les augures ne cessent de nous préparer au pire. Sans rire ni chanson.