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Semaine mondaine

Oui, il fait moche, oui il fait froid, gris et humide. Non, ça n’est pas près de s’arranger. Quant au budget de la Sécurité sociale ou de l’État, n’en parlons pas. Mais il y a aussi de bonnes nouvelles. Comme ce mail m’annonçant triomphalement la fin du Black Friday. Je ne sais pas vous, mais il me semble que jamais ce sombre tsunami de promotions n’avait été aussi puissant. Tout, absolument tout a été cassé, rabaissé, réduit. Oh, je sais bien que c’était Cyber Monday hier et que la semaine s’annonce de la même tendance, mais au moins avons-nous passé un cap. De toute façon, je suis plutôt dans ma Semaine mondaine, autrement dit ma Social Week, mais vous conviendrez que cela s’énonce beaucoup mieux en français. Depuis mon retrait de la vie active je garde un rythme social soutenu à défaut d’être intense. Et cela me convient très bien. Deux déjeuners par semaine, parfois trois, un café de temps à autre, correspondent à mon rythme. Les soirées sont souvent plus calmes, sauf ces jours-ci donc. J’étais ainsi invité hier au vernissage d’une exposition d’Olivier Roller. Je vous ai déjà parlé de cet artiste qui est l’auteur de la quasi-totalité des photos de couverture du magazine que j’ai eu le plaisir de diriger. Notre collaboration a commencé parce qu’il poursuit un travail sur les figures du pouvoir. Et c’est ainsi qu’il saisit dans les yeux des puissants ou croyant l’être, cette étincelle particulière qui les caractérise. Le regard des personnes exposées depuis hier dans la galerie d’une banque d’affaires parisienne est cependant légèrement différent puisqu’il est mort depuis plus de 2000 ans. Ce sont en effet les statues de ceux qui ont dominé l’Empire romain, qu’ils aient été empereurs, dieux ou rois, tous figés dans la lumière blanche des flashes d’Olivier. Mais comme toujours chez lui, ce qui est important est moins la beauté plastique de ces visages de pierre que ce qu’ils disent de ce pouvoir qui un jour ou l’autre s’effrite. Dans son discours d’accueil, mon ami racontait qu’il avait un jour fait visiter cette même expo, alors installée à Pékin, à l’un des maîtres du monde digital qui, après s’être fait expliquer la démarche artistique de l’auteur, lui avait acheté trois photos. Comme si, à l’inverse d’un Dorian Gray qui cachait le portrait garant de son éternelle jeunesse, il voulait avoir sous les yeux le témoignage de la friabilité de sa situation. Hélas les Néron de notre temps ne sont pas assez lucides pour comprendre que les ors dont ils s’entourent autant que les statues qu’ils se dressent seront balayés par les ans. Et qu’ils ne laisseront dans l’histoire que le souvenir d’années noires.