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Mémoire barrée

31 janvier 2025

N’allez pas croire que je profite de ma retraite pour mener une intense et mondaine vie nocturne. Vous n’alliez pas le croire ? Très bien. N’empêche que cette semaine je suis sorti deux fois. Oh ne soyez pas envieux, je vous en prie, ce ne sont que quelques cocktails et rencontres professionnelles, je ne suis pas convié aux premières et autres grandes soirées. Ça tombe bien, je n’en suis pas fan, surtout en cette saison où le costume cravate se prête mal à la circulation fraîche et humide à moto. Par chance hier, le thème de la soirée était les sports d’hiver. Enfin c’est une clause de style, car ma passion très modérée pour ces activités fait que je n’ai aucune tenue rappelant de près ou de loin la pratique du ski. Mais j’ai ainsi pu me présenter sans honte à mes hôtes, vêtu d’un gros pull aux couleurs chatoyantes ou presque. J’ai d’ailleurs été rassuré par le fait qu’en dépit de la décoration rappelant celle d’un restaurant d’altitude, la majorité des convives était en tenue de bureau. Pas trop de bonnets bariolés ou d’écharpes itou. Et encore moins de combinaisons fluo. Ce qui ne m’a pas empêché d’avoir du mal à en reconnaître certains. Oui car le moment est venu de vous faire un aveu pénible. Il m’arrive de plus en plus souvent dans ce genre de circonstances, de ne pas identifier certaines personnes qui me saluent d’un simple signe de connivence voire d’un geste ou de paroles chaleureuses. Certes, je pourrais imiter feu Bernard Pivot qui, lorsqu’il ne remettait pas quelqu’un, s’en tirait en lui demandant : « Alors cher ami, vous vous adonnez toujours à vos coupables activités ? » Mais je n’ai ni son audace ni sa popularité et c’est plus probablement ma mémoire qui me fait défaut. Une amie à qui je faisais part de ce souci m’a gentiment expliqué qu’en réalité, nous autres journalistes expérimentés connaissions trop de monde pour tous les mémoriser. Une sorte de saturation du disque dur. J’aime être rassuré. Mais je me dis aussi que nos génies de la technologie qui travaillent sans relâche à nous bâtir un monde meilleur – tout en augmentant leur cours de Bourse – pourraient réfléchir à une mémoire artificielle additionnelle sous forme de barrettes comme dans un PC. Ou mieux encore, de lunettes. Je leur en serais très reconnaissant. Facialement et socialement.