Ce devait être au mitan des années 90. J’étais – déjà – journaliste à CB News où je suivais la presse écrite. Je me rendais donc fréquemment au siège de journaux et de groupe de presse. Il arrivait alors qu’il faille laisser une pièce d’identité en échange d’un badge d’accès, document que l’on récupérait naturellement en repartant. Sauf cette fois où j’ai dû sortir de l’un de ses immeubles – généralement en verre et acier, selon la mode de l’époque – par une autre issue. À moins qu’en retard pour le prochain rendez-vous, j’aie simplement zappé cette étape. Toujours est-il que ce jour-là, je n’ai pas récupéré ma carte d’identité. Cette histoire sans intérêt est celle que j’aurais dû raconter sur le formulaire Cerfa numéro 14011*02 relatif à la déclaration de perte d’un papier d’identité. Ne disposant que de deux lignes pour expliquer la disparition dudit sésame, je m’en suis tenu à une déclaration lapidaire selon laquelle « j’ai perdu cette carte en 1995 sans que je puisse préciser où ni dans quelles circonstances ». Car voilà, depuis cette lointaine époque je n’ai jamais cherché à remplacer de document qui était alors en carton beigeasse et sur laquelle la photo devait montrer un jeune homme boudeur affublé d’une coiffure afro. Cependant mon actuel passeport étant récemment arrivé à échéance, j’ai décidé d’en profiter pour demander une nouvelle carte dont le format est aujourd’hui plus pratique pour se faire reconnaître lors du retrait de colis ou de tout autre envoi qui font le sel de notre vie moderne. Et voilà pourquoi j’ai passé une bonne partie de mon après-midi à remplir une pré-demande de papiers d’identité, activité requérant un haut niveau de concentration. J’ai dûment rempli des dizaines de champs, parfois redondants, pour garantir que j’étais l’enfant de mes deux parents, un citoyen français, pour justifier mon domicile avant d’acheter deux timbres fiscaux et de prendre rendez-vous dans une proche mairie afin d’achever les démarches. Loin de moi l’idée de me plaindre de ce parcours certes un peu fastidieux, mais ô combien plus simple que celui de l’époque où il fallait prévoir des heures de marche et de démarches dans les locaux poussiéreux de quelque préfecture. En ces temps de dénigrement des pouvoirs publics et de leur administration, j’avais envie de souligner un progrès. Appelez cela la bienveillance de la rentrée ou quelque chose comme ça. De là à voter la confiance…

Written by
Frédéric Roy
Ancien directeur de la rédaction de CB News disposant de beaucoup de temps après avoir longtemps couru derrière. J'écris tous les jours pour mon plaisir et, autant que possible, pour le vôtre.