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Claquement sans suite

Un claquement de doigts. Un réflexe, un peu idiot suivi d’un sentiment de culpabilité fugace et fulgurant. C’est ce que j’ai ressenti hier sur la terrasse d’une brasserie parisienne alors que je déjeunais avec un ami retrouvé. Encore un, me direz-vous et vous aurez raison. C’est l’un des privilèges de ma condition que de pouvoir revoir des gens que ma vie trépidante précédente ne me laissait pas le temps d’apprécier. Ne me jalousez pas, si ce n’est déjà le cas votre tour viendra mais ne me demandez pas quand, il semble que la question ne fasse pas consensus. Mais revenons à cette « cavitation » qui selon mes sources numériques, est le terme qui décrit le phénomène physique qui se produit lorsque le majeur vient frapper la paume, produisant une onde de choc sonore. Et déplaisante aux oreilles de certains, comme le garçon du café à qui ce geste était destiné. Il s’agissait naturellement d’attirer son attention pour lui demander l’addition. La terrasse se trouvant à l’intersection de deux avenues passantes dont l’une est surmontée par une station du métro aérien, il peut être nécessaire de s’agiter pour se faire remarquer. Ce que je faisais un peu frénétiquement sans succès. Et c’est alors que je fis le geste qui suscita chez la personne concernée une réaction légitime d’agacement. Il me signala donc qu’il viendrait prestement non sans me signifier son désagrément face à cette invite qu’il jugeait comminatoire et peut-être même insultante. Je m’en excusais prestement et à mon grand soulagement, il eut la délicatesse de ne point revenir sur ce léger différend en apportant la note attendue. Il est vrai que ce n’était rien, un battement d’ailes de papillon pendant un tremblement de terre. L’incident aurait été insignifiant si la conversation que nous avions, mon ami et moi, n’avait pas justement porté sur l’évolution des relations entre les générations. Un sujet assez courant chez les boomers qui observent avec perplexité les millennials, Z et suivants les juger autant qu’ils se jugent entre eux. Un autre camarade avait déploré lors d’un semblable repas il y a quelque temps, la violence de ces rapports alimentée par l’incompréhension mutuelle. Ce à quoi j’avais rétorqué que cela n’avait rien de nouveau et que, sans remonter à la nuit des temps, nous avions eu les mêmes comportements lorsque nous étions la génération montante. Si ce n’est qu’aujourd’hui, ce débat se tient sur les réseaux. Et que les mots claquent plus vite que les doigts.