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L’influence du silence

6 mai 2025

Elles sont de retour. J’en avais vu épisodiquement ici ou là depuis le printemps, mais hier c’était l’invasion. Des fourmis par centaines courant dans tous les sens sur le sol de la salle de bains. Vous le savez, je suis d’une très grande tolérance en général et celle-ci s’étend à ces insectes. Mais ce n’est pas facile de vivre ensemble sans se marcher dessus. Ce n’est agréable pour personne. Pour elle c’est mortel, pour moi c’est irritant. D’ordinaire, pour me donner bonne conscience, je me fraye un chemin à petits coups de balayette en espérant limiter les dégâts. D’autant qu’elles disparaissent généralement aussi vite qu’elles sont apparues. Mais ce matin-là, en constatant cette agitation frénétique alors que je m’apprêtais à faire ma toilette, je me suis souvenu d’un article dans lequel il était expliqué le rapport entre les corbeaux et les fourmis. Ne cherchez pas, cela n’a rien à voir avec une fable de La Fontaine. Il arrive en effet que ces noirs volatiles se posent sur des fourmilières pour laisser leurs habitantes leur grimper dessus. La raison de cet étrange comportement serait de se débarrasser de leurs parasites grâce à une substance connue sous le nom d’acide formique. Logique. Cette saine pratique porte même un nom, « l’anting » que l’on traduit en français par « fourmiliérage », ai-je appris à cette occasion. Je ne sais pas si ça compte au Scrabble mais c’est assez joli et j’ai envisagé un instant de m’y adonner avant ma douche. N’étant pas vraiment sûr de l’effet de cette potion naturelle sur mon métabolisme, j’ai plutôt tenté d’éviter à ces petits animaux silencieux de subir un « humaning », autrement dit un « bonhommage » écrasant et fatal. Une telle cure aurait pourtant pu avoir un effet bénéfique sur les idées grises qui se forment à l’écoute des nouvelles du monde. Au moins celles-ci ne m’empêchent-elles pas – encore – de dormir. Si tel était le cas, j’ai appris qu’une nouvelle technique circulait sur des réseaux sociaux que je ne fréquente pas et qui s’appelle le « sleepmaxxing ». Selon les adeptes de ce qu’il faudrait peut-être appeler dans notre langue le « machoirage », le fait de se poser un ruban adhésif sur la bouche favoriserait un sommeil réparateur. Bien que cette pratique ne repose sur aucun fondement scientifique, elle se diffuse grâce à des vidéos produites par d’influents imbéciles. Je ne peux pas rivaliser avec leur pouvoir de conviction mais j’envisage de lancer le « earbullshitting ». C’est intraduisible. Mais vous aurez certainement compris qu’il s’agit de se boucher les oreilles. Sans effet sur les acouphènes mais ça ne fait pas de mal au moral.