Comme on ne m’a pas posé la question, je vais y répondre. La musique. Quelle question ? Ah oui pardon ! Je l’ai entendue ces jours-ci à la radio ou sur un réseau social : « Quelles habitudes avez-vous gardé du confinement ? » En fait, la réponse complète et honnête serait, le lavage de main à haute intensité et la pratique quotidienne de la guitare. Mais peut-être ne m’aurait-on pas laissé le temps de développer autant, alors je profite de ce que nous soyons entre nous pour le faire. Les mains, c’est facile de comprendre pourquoi et nous devons être nombreux dans ce cas. La musique, j’en jouais une ou deux heures le week-end. Mais, forcé de télétravailler comme un malade – ah bon ? La formule est maladroite ? – du matin à la nuit, j’avais alors décidé de m’interrompre tous les soirs à 19 heures afin de produire des notes plus ou moins justes mais délassantes. Avant de reprendre le taf jusqu’à pas d’heure. Désormais, je ne travaille plus le soir – ni dans la journée – mais je garde le rythme en improvisant au gré des morceaux qui se présentent sur ma playlist. L’une des particularités de cet exercice c’est que dans la plupart des cas, je ne me souviens pas de la mélodie originale. Je brode donc mes propres harmonies selon mon inspiration et – surtout — les limites de mes capacités techniques. Il en est ainsi de pas mal de standards de jazz comme Jardin d’Hiver d’Henri Salvador dont mes variations approximatives ont trotté dans ma tête hier soir en traversant le jardin du Luxembourg. C’était approprié puisque nous sommes encore officiellement en hiver pour deux jours. Le temps était pourtant clément sous la belle lumière du soleil qui commençait à raser la cime des arbres encore déplumés. Une petite pointe de nostalgie nous a traversés ma femme et moi en passant dans ce lieu que nous connaissons depuis l’enfance. Il n’y avait pas le loueur de voiliers en bois au bord du grand bassin. Existe-t-il encore ? Aucune idée. Ce que je sais c’est que les chaisières ne sont plus là. À la vue de la foule considérable qui prenait le soleil hier soir, je regrettais presque ces dames d’un certain âge – souvent acariâtres – qui surgissaient de nulle part en exigeant quelques centimes (de francs) pour la location d’une inconfortable chaise en métal. Pour les radins et les désargentés, il y avait les bancs qui, comme chacun le sait, sont publics. Ah tiens, ça aussi c’est une chanson. De Brassens me dit internet. Je crois me souvenir de l’air mais je peux m’essayer à des variations. En privé.

Written by
Frédéric Roy
Ancien directeur de la rédaction de CB News disposant de beaucoup de temps après avoir longtemps couru derrière. J'écris tous les jours pour mon plaisir et, autant que possible, pour le vôtre.