En regardant par la fenêtre ce matin, je suis saisi d’un vertige quasi métaphysique. J’exagère à peine. Que vois-je en effet ? Un temps de saison, gris, pluvieux et venteux, éclairé par les feuilles jaunes et dorées qui se détachent des arbres au gré des bourrasques. C’est beau et déprimant. Parce qu’hier, alors que la météo était légèrement meilleure, j’ai passé une partie de l’après-midi à ratisser des feuilles mortes. Je ne les ai pas ramassées à la pelle, mais avec des râteaux pour les enfourner dans un container. Une belle fournée que les éboueurs emmèneront demain matin. Et tout ça pour quoi ? Pour que cela recommence la semaine prochaine, la suivante et, quand les branches seront enfin nues, l’année d’après… Je pourrais me dire que cette tâche répétitive n’est qu’une métaphore de notre vie au cours de laquelle nous recommençons constamment nos actions. Mais après tout, ce n’est pas si grave car j’aime assez nettoyer mon jardin en écoutant de la musique pour avoir la satisfaction du résultat, fut-il éphémère. Et puis, il y a tant d’autres choses que je fais sans vraiment savoir pourquoi. J’ai ainsi pendant quelques mois, posté mes textes quotidiens sur Threads. Vous savez, le contre X de Meta qui était censé se substituer au successeur de Twitter perverti par Mr Musk. Ça vous dit quelque chose ? Je pose la question parce qu’au fil des jours, je me suis aperçu que mes messages ne suscitaient aucune réaction. Ni like, ni haine. Une indifférence absolument totale. Je ne prétends pas déclencher des vivats ou des débats tous les jours, mais quand même. Un petit signe de reconnaissance aurait fait du bien. Face à ce rien, j’ai finalement renoncé à publier, sans plus troubler le silence assourdissant. Mais je continue naturellement sur ce bon vieux LinkedIn. Lequel me suggère tous les matins de rédiger une légende pour l’image d’illustration. Ce que je fais sans faillir bien que ces mots n’apparaissent nulle part, comme j’ai pu le constater récemment. Et pourtant je continuerai à écrire ces futiles phrases inutiles. Un peu comme un électeur démocrate d’un état qui ne l’est pas moins a pu voter au début du mois, tout en sachant que cela n’aurait aucun impact sur le résultat national. Peut-être parce que la conscience est un remède au vertige.

Written by
Frédéric Roy
Ancien directeur de la rédaction de CB News disposant de beaucoup de temps après avoir longtemps couru derrière. J'écris tous les jours pour mon plaisir et, autant que possible, pour le vôtre.