19 septembre 2024
Au cours de ma brillante carrière scolaire, un prof déclara un jour à ma mère que si le flipper avait été une matière éligible, j’aurais probablement sauté une classe. C’était un peu exagéré car s’il est vrai que je passais beaucoup plus de temps à améliorer mes scores qu’à faire mes devoirs, je n’atteignais pas les sommets que tutoyaient certains de mes camarades – je ne dénonce personne. Mais il est vrai que pendant quelques années j’ai été happé par ces rutilantes et lumineuses machines comme les générations suivantes ont pu l’être par les jeux vidéo (la vérité est que j’ai également été hypnotisé par ces derniers, mais c’est une autre histoire). Je jouais autant que je pouvais et j’en rêvais quand je ne jouais pas. Mais comme ce plaisir était payant, un franc – si je me souviens bien – pour la partie à trois boules, l’enjeu était de la faire durer le plus longtemps possible et d’en gagner des gratuites. D’autant que l’on devait également payer le café, ponction obligatoire, pour avoir le droit de jouer sous la surveillance du patron derrière son bar. Il fallait donc être un as de la fourchette et de l’amorti pour claquer des parties. Pour ceux que la dernière phrase laisse dubitatifs, je les renvoie à l’excellente page Wikipédia consacrée à cette machine, son histoire et son usage. Parmi les possibilités d’allonger le temps de jeu, il en est une qu’il n’est pas nécessaire d’expliciter, c’est l’Extra Ball. Si vous touchiez plusieurs fois la même cible, l’inscription « Same Player Shoot Again » s’affichait. Et la partie s’allongeait encore et encore. Un pur bonheur. J’ai totalement arrêté le flipper, du jour au lendemain, après avoir redoublé une classe, ayant – enfin — compris que cette formule que je trouvais si belle pouvait être comprise autrement. Et avec nettement moins de plaisir. Mais j’y repense souvent, comme ce matin en apprenant qu’après les explosions de bipeurs dont je vous entretenais hier, ce sont des talkies-walkies qui ont à leur tour semé la terreur au Liban. C’est encore cette expression à double tranchant qui me vient à l’esprit à propos de la campagne présidentielle américaine. Mais pas vraiment quand j’écoute les infos politiques. Là, c’est plutôt le choc implacable du Tilt qui me revient. Quand soudain, la machine se bloquait. Faute de l’avoir trop secoué.