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Au-delà du dénouement

8 juillet 2024

Je parle avec les morts. Avant d’aller plus loin et pour lever tout doute sur cet aspect de ma santé mentale, je précise que je n’attends aucune réponse de leur part. Je ne communique pas avec l’au-delà mais, ayant perdu mon père à l’âge de dix ans, j’ai pris pour habitude de le tenir au courant de l’évolution du monde. Au commencement, il s’agissait surtout de continuer une relation interrompue trop brusquement. Et puis c’est devenu ma manière personnelle de penser à lui mais aussi de prendre la mesure du temps qui passe et ses conséquences sur ma vie. Avec mon père, je me focalise plutôt sur la technique qui le passionnait. Autant dire que j’ai eu de quoi raconter sur ce sujet depuis la fin des années 60. J’ai connu ma mère beaucoup plus longtemps puisqu’elle a survécu 40 ans à son mari. Ma relation post mortem avec elle est donc différente. En l’occurrence elle est plus politique. Mes parents s’étaient connus à la fin des années 40 au Parti communiste français, seul endroit où un Haïtien de bonne famille rebelle débarquant en France pouvait rencontrer une juive qui avait rejoint le PCF pour y faire de la résistance. J’ai parlé politique avec ma mère pendant toute sa vie. Je l’ai emmené voter jusqu’à la fin. Elle y tenait, même si c’était devenu pour elle une difficile épreuve physique. Dans nos discussions de son vivant, nous n’étions pas toujours d’accord mais nous aimions peut-être plus débattre que convaincre. Ce n’est évidemment plus le cas. Mais elle aussi, je la tiens au courant de la vie politique de notre pays parce que là encore, cela me permet de réfléchir différemment au présent. Et j’ai eu de quoi faire ces dernières semaines. C’est ainsi qu’hier soir, j’ai réalisé que pour la première fois de ma vie, j’avais voté non seulement en raison du programme des candidats en lice, mais aussi – et surtout — en fonction de leur attitude face à l’antisémitisme. Et je dois avouer, non seulement à mes deux parents mais surtout à vous qui êtes bien vivants, que si le dénouement m’a soulagé, il ne m’a pas totalement rassuré.