Mon premier voyage sans mes parents était une aventure motorisée ce qui n’étonnera personne. Lauréat à la surprise générale du brevet des collèges, j’avais reçu en récompense de cet exploit, le plus beau des cadeaux : une Mobylette. Engin rutilant avec lequel j’avais entrepris dès le début de l’été de me lancer en compagnie d’un ami, dans un tour de la Bretagne. Une aventure épique dont je vous épargnerai les anecdotes éculées si ce n’est que parmi mes souvenirs, se trouve la visite d’un musée de la pêche en mer dans lequel une salle entière était consacrée aux boîtes de conserve de sardines et autres maquereaux. Ces pauvres vitrines étaient tellement incongrues à mes yeux d’adolescent que j’en avais piqué une crise de fou rire qui m’avait valu une sérieuse réprimande du gardien. Mais cette salle est restée dans ma mémoire comme le comble de la vacuité muséographique. Ce souvenir d’enfance m’est revenu la semaine dernière en repassant dans cette même jolie ville côtière où j’ai pu constater que l’établissement existait toujours. Mais je ne l’ai pas visité. Par manque de temps, nous étions sur la route du retour, mais peut-être aussi pour garder mon souvenir intact. Et puis il me faut avouer que je ne suis pas très fan de ce genre de visites culturelles pendant les vacances. Une sorte de paresse intellectuelle assumée. D’autant qu’il n’est pas forcément nécessaire de payer son billet pour en profiter. Ainsi, en passant dans une autre bourgade, j’ai aperçu un panneau faisant la promotion d’un Musée vivant des vieux métiers. Mon esprit facétieux qui n’a pas beaucoup évolué depuis la Mobylette m’a fait lire « Musée vivant des vieux ». Et il est vrai que c’est ce que j’ai ressenti au cours de cette escapade bretonne. Je sais qu’on me fait remarquer que je parle souvent de mon âge. Eh bien sachez que c’est terminé. En effet ces quelques jours au bord de la mer ont été une cure de jouvence bien plus efficace que la thalasso. Car une fois la rentrée officielle sonnée, il reste encore du monde sur les plages et dans les ports. Des vieux. Un océan de seniors couronné de sa blanche écume. Français, étrangers, valides ou non, avec et sans chien, pourvu ou pas de bâtons de marche, ils sont partout, à pied, en auto ou en camping-car. Un agréable peuple, calme et bienveillant, que l’on côtoie tous les jours, de la plage au resto. Un vrai petit bonheur. Partagé sans aucun doute car chacun se gausse des rides du voisin de table en oubliant ses propres failles. C’est la règle du jeu.

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Frédéric Roy
Ancien directeur de la rédaction de CB News disposant de beaucoup de temps après avoir longtemps couru derrière. J'écris tous les jours pour mon plaisir et, autant que possible, pour le vôtre.